Prise en charge de l’obésité en Alsace : quelles sont les solutions
déployées
à Colmar ?
Les établissements de santé cités dans cet article ne représentent
pas l’exclusivité des établissements dans la région.
Pour répondre aux besoins d’un bassin de
population de 400 000 habitants, cette partie de la région Grand-Est,
où la prévalence de l’obésité atteint 20,2%, propose plusieurs
dispositifs pour venir en aide aux personnes en situation d’obésité.
État des lieux avec le docteur Rudy Caillet.
J’habite dans le département du Haut-Rhin, je me sens en surpoids,
peut-être même en situation d’obésité. Que faire ? Vers qui puis-je me
tourner ? A qui dois-je en parler ? Qui peut m’aider, qui peut
m’accompagner ? Souvent complexe, parfois méconnu du grand public, le
parcours de soins d’une personne en état d’obésité nécessite rigueur
médicale et connaissance du sujet de l’obésité. Professionnalisme des
praticiens et structures adaptées. Mais aussi conception empathique de
l’obésité et prise en charge déculpabilisante.
Pour décrypter les différents chemins de soutien aux personnes en
situation d’obésité, et y voir clair dans les divers dispositifs de
prise en charge dans la région de Colmar, principale ville du
département du Haut-Rhin, le docteur Rudy Caillet, en poste aux
Hôpitaux Civils de Colmar, détaille les démarches du patient et
décrypte les structures existantes sur un territoire qui couvre les
besoins sanitaires de 400 000 habitants domiciliés dans la partie nord
du département du Haut-Rhin.
Se méfier de toutes les propositions trop restrictives en termes
d’apports caloriques
Pour le docteur Caillet, la discussion avec le médecin traitant doit
constituer le premier réflexe d’une personne en situation d’obésité.
« Il faut sonder le terrain avec son généraliste afin de savoir ce
qu’il connaît sur le poids, souligne le patricien de Colmar. A l’heure
actuelle, il est clair que la médecine générale n’est pas toujours
suffisamment formée pour savoir quoi proposer, mais surtout comment
aborder la personne en situation d’obésité sans la blesser, sans la
mettre dans l’impasse ».
Une fois ce premier pas accompli, la personne en situation d’obésité
doit se tourner vers des équipes spécialisées, entraînées et
multidisciplinaires. « Les
raisons de l’obésité sont souvent sous-tendues par la génétique,
entre 40 et 80%, mais souvent, il y a des comportements dus aux
préjugées dans l’obésité. Ils sont contre productifs et conduisent à
une aggravation de l’état de santé du patient, soit du fait de la
méconnaissance, soit du fait d’un contexte psychologique ou
psychiatrique aggravant », témoigne le docteur Caillet qui s’inquiète
des mécanismes de restriction alimentaire et de culpabilisation dont
les personnes en situation d’obésité sont souvent la cible.
A ce titre, le docteur Caillet insiste sur le fait que, de manière
générale, il faut se méfier de toutes les propositions qui seraient
trop restrictives en termes d’apports caloriques ou qui vont
diaboliser certains types d’aliments. « Mieux vaut trouver un
professionnel de santé qui s’attache plus au comportement alimentaire,
au psychisme et au vécu face à l’alimentation plutôt qu’au seul
contenu de l’assiette », poursuit le praticien hospitalier de Colmar.
Autre piste : entrer en contact avec un diététicien libéral - qui a
intégré cette notion de travail en équipe pluridisciplinaire - dont
les conseils peuvent être pertinents et performants.
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« A Colmar, les patients peuvent intégrer le Réseau Santé sur
inclusion par le médecin généraliste »
L’autre étape concerne la prise en charge. Bénéficiant d’une voie
d’accès facilitée, les médecins traitants sont en contact avec le Réseau
Santé Colmar (1). Il s’agit d’une structure publique qui propose
des prises en charge forfaitaires, annuelles et financées par la
Caisse d’assurance maladie. « À Colmar, les patients peuvent intégrer
ce dispositif sur inclusion par le médecin généraliste ou par d’autres
structures sanitaires qui s’occupent des questions de poids »,
détaille le docteur Caillet.
Après une première réunion d’information, ce dispositif propose des
ateliers sur les trois axes de la prise en charge du poids et de la
santé : le psychisme, l’activité physique, le comportement
alimentaire ou la diététique. Les séances se déroulent principalement
en atelier de groupe environ une fois par semaine ou tous les quinze
jours. Il existe aussi des temps individuels.
S’occuper du poids et/ou de l’obésité d’un patient signifie, pour le
docteur Caillet, avoir un angle de vue spécialisé, tant dans
l’évaluation et le diagnostic que dans l’orientation thérapeutique. «
C’est le médecin spécialiste de l’obésité qui peut, le mieux,
construire et coordonner un parcours de soins dans l’obésité en
fonction de la typologie de chaque patient. L’idée, c’est d’abord de
trouver une structure aidante qui ait une conception empathique et
bienveillante du poids, et qui ne soit pas stigmatisante. En arrivant,
il faut que la personne se sente entendue et comprise », explique le
praticien alsacien.
Pour proposer une offre de soins plus individualisée que
standardisée, les médecins nutritionnistes des Hôpitaux Civils de
Colmar reçoivent les patients en consultation dans le cadre d’un
diagnostic et d’une évaluation thérapeutique. « C’est là que nous
allons coordonner les parcours. On peut s’appuyer sur les différentes
structures ou les prendre au sein de notre unité », poursuit le
docteur Caillet.
Selon sa typologie et le diagnostic, le patient se rendra en hôpital
de jour pour une évaluation tridimensionnelle (activité physique
adaptée, psychologie et comportement alimentaire) et entrera dans un
projet d’amaigrissement avec la prise en charge initiale vers un mode
de vie sain et durable, un éventuel traitement médicamenteux, ou un
recours à la chirurgie bariatrique suivant les résultats de
l’évolution de la pathologie, ou ses complications. « Nous sommes
toujours à la recherche d’une prise en charge logique. L’obésité, qui
est une maladie chronique, nécessite un suivi médical, à tous les
stades, que les patients soient traités ou non par chirurgie »,
précise le docteur Caillet.
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« La prise en charge est multidimensionnelle avec des consultations
sur la nutrition, l’obésité, le diabète… »
Dans le panel des structures existantes dans la région de Colmar, les
patients peuvent être également adressés à des praticiens qui
travaillent dans d’autres structures de vie, comme par exemple les
UGECAM. Ces établissements de santé privés d’intérêt collectif
appartiennent à la Caisse d’assurance maladie et proposent des
hospitalisations le plus souvent ambulatoires sur différentes
pathologies, y compris les pathologies neurologiques ou les
difficultés de mobilités. « Cela fonctionne comme un hôpital de jour
de nutrition suivant des modalités temporelles et géographiques
particulières », commente le docteur Caillet.
Sur une période de six semaines, l’UGECAM de Colmar ou de Mulhouse proposent un
suivi médical, des activités physiques adaptées et de renforcement
musculaire, un suivi psychologique, ergothérapique, etc. Objectif :
suivre un accompagnement personnalisé pour aider le patient à mieux
gérer la surcharge pondérale, les troubles métaboliques et du
comportement alimentaire.
« Il s’agit d’honorer des rendez-vous quotidiens. L’avantage, c’est
qu’on part de chez soi le matin et on rentre chez soi le soir. Sur
place, les consultations nutrition obésité sont accessibles
directement avec des médecins nutritionnistes et une équipe
multidisciplinaire ».
Autre option : l’établissement de Soins de Suite et de Réadaptation
(SSR) des Trois Epis, situé à une quinzaine de kilomètres de
Colmar. Cette structure privée de la Mutuelle générale de l'Education
Nationale (MGEN) développe une organisation spécifique vis-à-vis de
l’obésité et de la réadaptation nutritionnelle. « Ce SSR agit comme
une maison de convalescence qui fait de l’hospitalisation complète sur
une durée minimale de trois semaines. La prise en charge est
multidimensionnelle avec des consultations sur la nutrition,
l’obésité, le diabète, les troubles du comportement alimentaire avec
des techniques accessibles comme, par exemple, l’art-thérapie »,
souligne le docteur Caillet.
Cette unité d’hospitalisation est également en capacité d’accueillir
des patients en situation d’obésité morbide ou massive. « Elle est
adaptée et structurée pour la rééducation et la médicalisation. Elle
dispose de tout l’équipement pour recevoir les patients de plus de 150
kilos et en perte d’autonomie. » Ce SSR possède toute la latitude pour
assurer la prise en charge de toutes les obésités, y compris les plus
complexes. Mieux : elle fait aussi office de structure de recours pour
le Centre Spécialisé Obésité (CSO) de Strasbourg
qui peut y envoyer des patients si nécessaire.
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Un futur cercle de réflexion à Colmar pour désamorcer la vision
culpabilisante et stigmatisante
De son côté, le Centre départemental de repos et de soins
propose, à destination des personnes âgées, une unité de soins de
longue durée et une structure d’accueil spécialisée, en cas notamment
de handicap physique et psychique avec une problématique de poids ou d’obésité.
Autres contacts potentiels dans la région de Colmar qui permettent
d’aider les personnes en situation d’obésité : l’association Stop
Obésité Alsace, l’une des plus anciennes associations de
patients opérés bariatriques en France et la petite structure privée
Apiscor déployée par un kinésithérapeute rééducateur et une
diététicienne libérale à la formation psychocomportementale qui aborde
l’obésité avec une conception tout à fait actuelle. « Dans le cadre
des différents parcours de soins organisés par l’hôpital de Colmar, on
lui adresse des patients pour la rééducation et le travail corporel,
précise le docteur Caillet. Ce sont des activités physiques adaptées
remboursées par convention. »
Pour les initiateurs d’Apiscor, non seulement l’innovation technique
ne doit pas aller à l'encontre de la relation humaine, mais le
changement de comportement à long terme repose également sur la
motivation d'un individu. « Notre prise en charge repose sur
l'établissement de profil motivationnel. Grâce à l'intelligence
artificielle, les informations nécessaires aux professionnels de santé
sont communiquées dans toute la durée du "parcours patient"
que ce soit pour une chirurgie bariatrique ou pour un price en charge
conservateur. Ainsi chaque professionnel peut établir une relation
humaine et une prise en charge adaptée pour le patient. », détaille
Raphaël Juen d’Apiscor.
Des structures et des dispositifs, mais aussi de la réflexion pour
traiter la maladie obésité dont la prévalence atteint 20,2% dans la
région Grand-Est selon la dernière étude épidémiologique Obepi-Roche
2020. « Nous souhaitons à terme lancer sur Colmar un cercle de
réflexion pour désamorcer la vision culpabilisante et stigmatisante de
la personne en situation d’obésité », estime le docteur Caillet. Cela
permettra de sortir du schéma classique alimentation/activité physique
et d’aborder d’autres causes de l’obésité comme les polluants
organiques persistants ». Il en va de la connaissance des soignants,
de la juste orientation thérapeutique et de l’accessibilité aux soins
des patients.
(1) Il existe des Réseaux de santé dans de nombreuses régions en
France qui, en règle générale, travaillent autour des pathologies
chroniques comme les pathologies cardiaques, le surpoids ou le diabète.
« Travailler sur la vision non stigmatisante de l’obésité et réhabiliter
la notion de diversité corporelle : un équilibre sur le fil entre
pathologie chronique et acceptation »
Le docteur Rudy Caillet, 45 ans, a fait ses études de médecine à
Nancy, avant de rejoindre le Centre hospitalier de Bar-le-Duc (Meuse)
jusqu’à fin 2019. Praticien hospitalier nutrition aux Hôpitaux civils
de Colmar depuis plus de deux ans, celui qui se destinait plutôt vers
la médecine générale a été rattrapé par son goût pour la nutrition et
le travail d’équipe en médecine polyvalente. « J’ai toujours été
intéressé par la nutrition, le diabète, maladies métaboliques et
l’obésité », explique-t-il comme en témoignent ses acquis
universitaires en matière d’obésité, d’éducation thérapeutique du
patient et de nutrition humaine.
Au fil de sa carrière, l’accompagnement de nombreux patients en
situation d’obésité et l’écoute qu’il a déployée lui ont permis
d’identifier différentes problématiques structurelles compliquant
l’obésité et la médecine de l’obésité. « J’ai toujours été un peu
triste de voir comment les patients étaient traités en milieu
hospitalier, commente le docteur Rudy Caillet. La méconnaissance du
processus de développement de l’obésité et l’ignorance de sa part
invariable prépondérante sont les sources d’une stigmatisation
ubiquitaire qui éloigne les soignants et les soignés d’une médecine de
l’obésité appropriée. »
Pour lui, il est indispensable de travailler prioritairement sur la
vision non stigmatisante de l’obésité et de réhabiliter la notion
d’acceptation et de diversité corporelle pour renforcer l’engagement
dans le soin, côté soignant et côté soigné. Autre objectif :
construire un parcours de soins coordonné avec une vision harmonisée,
empathique et respectueuse de la pathologie obésité avec tous les
acteurs impliqués de près ou de loin, qu’ils soient professionnels de
santé ou issus de la société civile.
Médecine de l’obésité de l’adulte : les acteurs du Haut-Rhin débattent
le 10 juin 2022
Le Centre de Formation des Professions Paramédicales de l’hôpital
Pasteur, à Colmar, accueillera le vendredi 10 juin prochain, la
Journée Territoriale du Haut-Rhin consacrée au parcours du patient en
situation d’obésité. Le professeur Alain Pradignac du Centre Spécialisé Obésité (CSO) de Strasbourg et
le docteur Agnieszka Smagala, endocrinologue des Hôpitaux civils de
Colmar, ouvriront les débats.
Lors de ce rendez-vous professionnel, les différents acteurs du
département du Haut-Rhin interviendront sur de nombreux sujets.
Au programme : le point sur l’obésité en Alsace, les principes de
traitement de l’obésité, les réconciliations corporelle, psychique et
alimentaire. En fin de matinée, le docteur Rudy Caillet interviendra
sur le thème « Quelle orientation avec la triple réconciliation ».
L’après-midi, quatre ateliers simultanés permettront à des
kinésithérapeutes, des enseignants en activités physiques adaptées,
des psychologues, des nutritionnistes, des pharmaciens, des
chirurgiens, des infirmières, etc. d’échanger sur le parcours de soins
des personnes en situation d’obésité.
Journée mondiale de l’obésité 2022 : libérer la parole, stopper les
préjugés
Pour lutter contre les idées reçues, neuf personnes en situation
d’obésité ont accepté de servir de modèle dans le cadre d’une campagne
de sensibilisation à l’initiative de Novo Nordisk. Le public découvrira
leur parcours dans le métro parisien et sur les réseaux sociaux à partir
du 28 février.
Pourquoi les connaissances ne sont-elles pas toujours suffisantes pour
prendre en charge l’obésité?
La plupart des actions contre l’obésité se concentrent sur la prévention
et le font à travers «l’éducation». Mais il y a une raison pour laquelle
cette approche n’a eu aucun impact sur l’obésité, quels que soient nos
efforts d’éducation.
Allons de l’avant: de l’exclusion au monde libre de toute stigmatisation
du poids
La distanciation sociale n’est pas une nouveauté pour tout le monde. Les
personnes atteintes d’obésité en sont, en réalité, des experts. Au
moment où nous réinvestissons le monde en tant que société, je me
demande si nous pouvons choisir d’en faire un meilleur endroit pour chacun.
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